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Insights de septembre : que s'est-il passé sur les marchés de l'énergie ?

Rédigé par Kuartz | 10 oct. 2025 09:01:59

Le marché spot de l'électricité en septembre 2025 a atteint un jalon significatif. Il s'inscrit dans la tendance de stabilisation observée tout au long de l'été, mais il se distingue par l'apparition d'une déflation tarifaire aiguë.

Bien que cette chute des prix témoigne d'une résilience retrouvée pour le système électrique, les mécanismes de valorisation des énergies renouvelables (ENR), et notamment l'éolien, ont été, eux, mis à rude épreuve. L'analyse de ce mois révèle que l'abondance de l'offre et une demande modérée ont créé ces conditions de prix historiquement faibles, tout en soulignant un besoin impératif de renforcer la flexibilité pour mieux gérer cette abondance.

Le prix SPOT : le sens du retour à la normale

Le prix SPOT est l'indicateur fondamental du coût du MWh échangé à très court terme sur des plateformes comme l’EPEX SPOT. L'évolution de ce prix en septembre est la preuve la plus claire du rééquilibrage du marché.

Le prix EPEX SPOT moyen s’est établi à 38,17 €/MWh. Ce niveau est extrêmement significatif, car il symbolise une nette accélération de la déflation tarifaire.

  • Le creux post-crise : ce prix marque un retour structurel à la normalité du coût de l’énergie. Pour saisir l'ampleur de ce réajustement, il est essentiel de se référer aux années précédentes : ce prix est extrêmement éloigné des 394 €/MWh enregistrés en septembre 2022, période marquée par le pic de la crise énergétique mondiale. La stabilité, déjà perçue en juillet (59,61 €/MWh) et en août (55,30 €/MWh), atteint en septembre son point le plus bas pour l’année en cours.

  • Maîtrise des extrêmes : Le marché démontre également une maturité dans la maîtrise des prix extrêmes. Le prix maximum atteint (133,26 €/MWh) continue de baisser par rapport au maximum d'août (155,10 €/MWh). Cette tendance montre une capacité accrue du système à prévenir les flambées tarifaires souvent associées aux pics de consommation non anticipés.

De plus, la volatilité globale est restée contenue. L'écart maximal entre les prix quotidiens (le spread intra-journalier) a été de 148,49 €/MWh, en légère diminution par rapport à la période précédente. Une volatilité maîtrisée est un signal positif, car elle simplifie la gestion des risques et la planification pour les fournisseurs, agrégateurs et industriels.

Prix négatifs : signe d'un excédent mieux absorbé

Le phénomène des prix négatifs, survenu lorsque l’offre excède brutalement la demande, a connu une évolution significative entre août et septembre.

  • Réduction de la fréquence : Le mois d'août 2025 avait été marqué par un retour en force des prix négatifs, avec 62,00 heures enregistrées. En septembre, cette dynamique s'est inversée de manière spectaculaire : le nombre d'heures avec un prix négatif a chuté à 23,00 heures. Cette forte réduction suggère une meilleure absorption des excédents par le système électrique. Cela est le fruit d'un renforcement des mécanismes de flexibilité (effacement, stockage, pilotage intelligent) et d'une meilleure capacité à exporter les surplus vers les pays voisins.

  • Pression tarifaire aiguë : Cependant, si la fréquence a diminué, l'intensité des déséquilibres reste forte. Le prix minimum a plongé à -53,40 €/MWh. L'explication de cette valeur minimale plus profonde que celle d'août (-50,29 €/MWh) est que, lorsque l'excédent de production (nucléaire et renouvelable) et la demande modérée ne s'alignent pas, le système doit toujours faire face à des situations extrêmes qui génèrent une pression tarifaire très forte et ponctuelle.

Le fait que la moyenne de période avec prix négatif ait diminué confirme que les épisodes de surplus ont été plus courts, mais plus intenses.

Le paradoxe de la valorisation des renouvelables

Septembre a mis en lumière une tension croissante entre la performance physique et la performance économique des parcs de production renouvelable. La performance économique est mesurée par le prix de capture, c'est-à-dire le prix moyen effectivement obtenu par la filière pour son électricité.

L’éolien : une production abondante mal rémunérée

L'éolien a bénéficié de conditions physiques très favorables, son Facteur de charge éolien ayant bondi à 20,94 %. Ce niveau élevé témoigne d'une contribution physique accrue et réussie à la couverture de la demande.

Pourtant, cette abondance s'est traduite par un effondrement de sa valeur économique :

  • Le prix de capture éolien s'est effondré à seulement 27,50 €/MWh.

  • L'explication fondamentale de cette dévaluation massive (une chute de 48,8 % du prix) réside dans le fait que l'énergie éolienne a été majoritairement injectée sur le réseau durant des heures où l'offre était excédentaire ou la demande était faible.

  • Le point essentiel est que ce prix capturé (27,50 €/MWh) est très nettement inférieur au prix SPOT moyen du mois (38,17 €/MWh).

Cette situation, qui contraste fortement avec le mois d'août où le prix de capture éolien (55,19 €/MWh) était quasi équivalent au prix SPOT moyen (55,30 €/MWh), indique que l'éolien a produit massivement aux mauvais moments pour la rentabilité, ce qui pénalise directement l'économie de la filière.

Le Solaire : sous-valorisation structurelle

Le solaire a également fait face à des difficultés de valorisation, exacerbées par un recul naturel de la production en fin de saison estivale.

Le prix de capture solaire a continué sa tendance baissière pour atteindre seulement 23,68 €/MWh.

La raison structurelle de cette sous-valorisation persistante, qui place le prix solaire en dessous du prix SPOT moyen et du prix de capture éolien, est la simultanéité de la production sur l'ensemble du territoire à midi. Cette injection massive et synchrone tend à saturer le marché sur les créneaux de la mi-journée et tire spécifiquement les prix à la baisse.

Conclusion : l'impératif de la flexibilité

Le mois de septembre 2025 confirme une maturité incontestable pour le marché spot, avec un prix moyen extrêmement bas qui procure une stabilité tarifaire aux consommateurs.

Toutefois, la forte dévaluation de l'éolien met en lumière un défi de valorisation critique. Le marché signale que l'intégration croissante des renouvelables n'est pas encore parfaitement harmonisée avec la demande.

La conclusion à tirer est l'impératif de renforcer la flexibilité, la digitalisation et l’intelligence des réseaux. Ces outils (stockage d'électricité, effacement piloté, interconnexions) sont cruciaux pour lisser les fluctuations des prix et garantir que l'électricité verte soit injectée (ou stockée) en phase avec les besoins réels du système et les périodes les mieux rémunérées.

Ce contexte incite fortement les développeurs de projets et agrégateurs à affiner leurs stratégies de valorisation. La préservation de la rentabilité économique des acteurs impliqués dépend plus que jamais de leur expertise technique pour mieux gérer et ajuster les flux de production.