ÉNERGIE

Le grand retour de l'éolien et le paradoxe des prix : analyse de novembre 2025

Novembre 2025 signe la fin des prix négatifs, mais voit les pics de prix SPOT s'envoler à 194€/MWh. Retour sur le mois qui a vu l'éolien se réveiller.


Après un mois d'octobre étonnamment clément qui avait vu le marché se tendre, novembre 2025 marque le vrai coup d'envoi de l'hiver électrique. Le système a dû faire face à la baisse naturelle des températures et au raccourcissement des jours, ce qui se traduit par des dynamiques de prix bien différentes de celles de la rentrée.

Ce mois de novembre est un cas d'école pour comprendre l'impact de la saisonnalité sur les actifs de production et sur la nécessité de l'agilité du pilotage.

1. Prix SPOT : Le marché sous tension, mais mieux équilibré



Le premier constat de ce mois de novembre est le maintien d'un niveau de prix moyen élevé, signe d'une forte sollicitation du système. Mais, si le marché est sous tension, il fait preuve d'une bien meilleure maîtrise des situations de surplus d'offre.

Un prix moyen qui se maintient



Le prix moyen de l'électricité s'est établi à 60€/MWh, en légère hausse par rapport aux 58€/MWh d'octobre. Ce maintien au-dessus des 60€ confirme que le système électrique est sous tension, une situation normale pour une fin d'automne où la demande de chauffage s'active.

Cependant, la tendance long terme reste à la stabilisation, bien loin des crises passées :

  • 2022 : 192€/MWh (crise majeure)
  • 2023 : 89€/MWh (sortie de crise)
  • 2024 : 101€/MWh (réajustement)
  • 2025 : 60€/MWh

La disparition des prix négatifs : une gestion parfaite des creux



C'est l'événement majeur du mois pour les responsables de l'équilibrage : les prix négatifs ont totalement disparu.

  • Nombre d'heures négatives : 0h (contre 20h en octobre)
  • Prix minimum : remontée à -0€/MWh (contre -2€/MWh en octobre)

Il faut bien interpréter ce signal. Cette disparition ne signifie pas que le marché est "facile", mais qu'il n'y a aucun surplus d'offre quand la demande est faible. En octobre, des épisodes venteux ou solaires sur des creux de consommation pouvaient saturer le réseau. En novembre, la chute drastique de la production solaire (saisonnalité oblige) a supprimé ces excédents de milieu de journée. Le réseau absorbe toute la production, même la nuit ou le weekend. Pour un producteur, c'est la fin (temporaire) du risque de devoir payer pour injecter.

L'alerte sur la pointe : une gestion difficile des pics



Si les creux sont maîtrisés, les sommets posent problème. Le prix SPOT maximum a bondi à 194 €/MWh (contre 157€/MWh en octobre), creusant un écart de prix de 118 € sur le mois.

Ce pic à près de 200€ témoigne d'une mauvaise gestion du surplus de demande. Le scénario est classique mais brutal : à 19h, le solaire est éteint. Si l'éolien ne souffle pas assez fort à cet instant précis ou si les moyens pilotables (gaz, hydraulique, nucléaire) sont contraints, il n'y a pas suffisamment de production disponible pour répondre sereinement à l'appel de puissance des foyers français. Le marché doit alors aller chercher des capacités de production marginales très coûteuses pour éviter le black-out, ce qui fait exploser le prix ponctuellement.

2. Filière éolienne : le réveil des géants



Après un mois d'octobre calme, novembre 2025 signe le grand retour des dépressions et du vent.

Une production qui double



Les développeurs éoliens respirent :

  • Le facteur de charge a plus que doublé, passant de 13,18% à 30,38%
  • Le taux de couverture grimpe à 16,83% (contre 5,09% en octobre)

L'éolien a repris sa place de pilier du mix électrique français. C'est ce volume massif qui a permis de contenir le prix moyen à 60€, empêchant une explosion plus large des coûts malgré la demande hivernale.

Une valorisation en demi-teinte



Cependant, la valeur capturée nuance ce succès volumétrique.

  • Taux de capture : 87,94% (en hausse par rapport aux 84,60% d'octobre)
  • Prix capturé : 53€/MWh

Pourquoi un taux inférieur à 100% ? Parce que l'éolien a majoritairement produit quand la demande était normale ou faible (nuits ventées), et non pendant les fameux pics de 19h à 194€. L'éolien a donc "raté" les moments les plus rémunérateurs du mois, diluant sa performance financière moyenne.

3. Filière solaire : l'entrée en hibernation



Pour le solaire, la fête de l'été indien est terminée. Les données de novembre illustrent parfaitement la saisonnalité de cette énergie.

Chute libre de la production



Les chiffres ne surprendront personne, mais ils sont marquants :

  • Facteur de charge : effondrement à 6,12% (contre 17,48% en octobre)
  • Taux de couverture : à peine 3,72% de la demande couverte

Le solaire est devenu marginal dans le mix de novembre.

La double peine sur la valeur



Le plus dur pour la filière solaire n'est pas la baisse de volume, mais la baisse de la valeur unitaire :

  • Taux de capture : chute à 80,31% (contre un record de 96,35% en octobre)
  • Prix capturé : 48€/MWh

C'est l'effet pervers de l'hiver pour le PV. Le solaire produit exclusivement en milieu de journée. Or, en novembre, les prix élevés sont concentrés le soir (18h-20h), quand il fait nuit. Le solaire ne capture donc jamais ces prix avantageux. Il vend ses MWh sur le créneau de midi, où les prix sont modérés (autour de 40-50€), ce qui est bien inférieur à la moyenne mensuelle du marché (60€) gonflée par les pics du soir.

Conclusion



Ce mois de novembre 2025 nous offre une leçon appliquée au marché : la flexibilité est reine.

L'absence de prix négatifs prouve que le système sait gérer les creux, mais les pics à 194€ prouvent qu'il peine à gérer les "débordements".

  • L'éolien apporte le volume mais manque parfois de timing
  • Le solaire s'efface logiquement

Pour nos clients, la conclusion est claire : la valeur ne réside plus seulement dans la production de MWh, mais dans la capacité à être présent lors des tensions. Pour les mois à venir, surveiller les pics du soir sera l'enjeu financier numéro un.

Rendez-vous en décembre, où le froid pourrait bien accentuer encore cette fracture entre un marché calme la nuit et déchaîné le soir.

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